mercredi 25 mars 2009

BELGIQUE; Déclaration finale des assises de la coopération – Bruxelles, 20-21 mars 2009

Ce début de 21ème siècle est marqué par l’émergence d’un monde multipolaire et une succession de crises globales (financière, climatique, alimentaire, …) qui bouleversent les relations internationales et plongent la majorité de la population mondiale dans la pauvreté. Cette crise systémique est la conséquence d’un système économique fondé sur la course à la compétitivité et qui se nourrit de la spéculation financière, des inégalités sociales et de la surexploitation des ressources naturelles. Elle frappe l’humanité dans son ensemble, à commencer par les populations les plus vulnérabilisées parmi lesquelles les femmes et les migrants, et annihile tout espoir d’atteindre les objectifs internationaux de développement et de garantir la satisfaction universelle des droits fondamentaux.

La coopération indirecte dans un monde en mutation

La coopération non gouvernementale a sensiblement évolué au cours de ces dernières années : de l’exécution de projets consistant à fournir des biens et des services à des populations en état de carence dans les pays en développement, elle évolue vers le renforcement des capacités des femmes et des hommes acteurs de changement et organisés en tant que société civile dans le Sud.
L’efficacité de l’aide n’a de sens que dans le cadre d’une stratégie globale visant l’efficacité du développement, ce qui implique une cohérence des politiques extérieures des gouvernements qui doivent, au Nord comme au Sud, orienter leurs politiques vers le développement humain durable à travers le respect des priorités des partenaires et l’éradication de la pauvreté.
L’efficacité du développement implique en outre de reconnaître la spécificité des besoins différenciés qui existent en matière de développement entre les hommes et les femmes, et dès lors d’appuyer les stratégies juridiques, politiques et sociales qui visent l’égalité de genre dans une perspective de droits humains.

En tant qu’émanation de la société civile engagée dans la solidarité internationale, les ONG et les autres acteurs de la coopération indirecte représentent des contre-pouvoirs démocratiques dont l’objectif est de faire pression en faveur de la cohérence des politiques extérieures des gouvernements en vue de garantir le droit au développement. Cela implique pour les ONG et les autres acteurs de la coopération indirecte de soutenir leurs partenaires du Sud dans l’analyse des politiques mises en œuvre dans leur pays et, si nécessaire, de les appuyer dans leur rôle de contre-pouvoir lorsque les politiques gouvernementales s’inscrivent en porte-à-faux avec le droit au développement et qu’elles accentuent les disparités économiques, sociales et de genre.

- En tant qu’acteurs de coopération au développement, les ONG et les autres acteurs de la coopération indirecte ont le devoir de veiller à l’efficacité de leurs interventions. Ils prennent l’engagement de renforcer les efforts de synergie et de concertation, entre eux et avec leurs partenaires du Nord et du Sud, pour assurer une harmonisation et une cohérence de leurs actions.

- En contribuant au développement de leur pays par leur ancrage social et leur connaissance du contexte local, les partenaires du Sud jouent un rôle essentiel sur le terrain auprès des populations privées de leurs droits. Sur base de ce principe, les ONG et les autres acteurs de la coopération indirecte disposent d’un droit d’initiative propre en matière d’appui à leurs partenaires du Sud : les choix des partenaires, de leurs secteurs d’intervention, de leurs méthodes et des zones dans lesquelles ils interviennent s’appuient sur des critères propres à leurs stratégies, à leurs finalités et à leur histoire.
Le temps de la société civile n’est pas celui du politique. L’expertise de la coopération non gouvernementale est spécifique et différente de celle de la coopération gouvernementale. Elle est irremplaçable dans les régions délaissées ou auprès des groupes exclus ou marginalisés par les gouvernements pour des raisons conjoncturelles ou politiques.

Des partenariats pour le droit au développement

Les programmes de coopération indirecte doivent s’aligner sur les stratégies des partenaires du Sud, afin de garantir des stratégies de développement appropriées qui garantissent la justice sociale et la répartition équitable des ressources. Ces partenariats se construisent et inscrivent leur action dans la durée, en vue de générer du changement social. Ils se fondent sur l’analyse des acteurs, du contexte politique et économique, des contradictions sociales, des obstacles et des potentialités.

- En tant que vecteurs de l’aide publique et privée au développement, les ONG et les autres acteurs de la coopération indirecte doivent concourir à l’indépendance de leurs partenaires du Sud envers les pouvoirs publics et le secteur privé. Les méthodologies d’intervention impliquent les partenaires en tant qu’acteurs du développement et garantissent leur participation effective pour promouvoir l’émancipation des personnes et des groupes sociaux discriminés, par le renforcement de leur autonomie matérielle, culturelle, sociale et politique.

- Les partenaires, qu’ils se situent au Sud ou au Nord, ont des rôles complémentaires qui se déclinent dans des contextes différents en fonction de la position occupée et des compétences de chacun. Cependant, la position de chaque partie n’est pas égalitaire. Elle dépend de plusieurs facteurs comme l’accès aux ressources, l’arbitrage de leur affectation et la détention de l’information. Des entités partenaires resteront dès lors toujours des entités différentes, qui ont trouvé un terrain d’entente et une convergence d’objectifs suffisamment larges pour collaborer, à côté desquels chaque institution poursuit légitimement ses intérêts propres. Il y a donc des conditions à respecter pour gérer de façon saine les rapports de force et équilibrer la relation de partenariat, comme le principe de transparence réciproque, l’existence d’espaces de concertation et le droit de regard réciproque sur les processus mis en place pour atteindre les résultats et gérer les ressources.

Des alliances pour un nouveau paradigme

Dans un monde multipolaire, les partenariats s’inscrivent dans le développement de réseaux internationaux (Nord-Sud, Sud-Nord, Nord-Nord et Sud-Sud), en vue de nouer des alliances et créer des rapports de force citoyens en faveur du droit au développement.
Les réponses apportées à la crise systémique par les gouvernements ne sont pas plus à la hauteur que les moyens mobilisés pour financer le développement. Malgré les effets d’annonce en matière d’aide au développement, d’allègements de dettes et de préférences commerciales, ce sont les pays du Sud qui financent ceux du Nord suite à la fuite massive de capitaux dont ils sont victimes.
Face aux tentations de repli sur soi alimentées aux quatre coins du monde par les conséquences de la crise systémique, nous affirmons que la seule réponse adéquate et durable est le renforcement de la coopération internationale dans un cadre multilatéral et démocratique.
Le monde n’a pas seulement besoin de plans de sauvetage à court terme, mais d’un nouveau paradigme fondé sur les quatre points cardinaux de notre vision du développement que représentent l’accomplissement des droits humains fondamentaux, l’expansion de la démocratie, le respect de l’environnement et la diversité culturelle.

- Nous appelons au renforcement et à l’élargissement des alliances citoyennes en vue de promouvoir ce nouveau paradigme. Ces alliances doivent notamment intégrer les ONG, les organisations syndicales, les associations de défense des droits humains, les mouvements de femmes, les organisations de défense de l’environnement, les associations de migrants et les organisations de défense de la paix et de la démocratie. Elles doivent se développer du local au global, afin de garantir une cohérence entre les actions ancrées localement et les revendications portées à l’échelle internationale. Cela implique de coordonner ces alliances à l’échelle nationale et mondiale, mais aussi à l’échelle continentale afin de peser efficacement sur les processus d’intégration régionale. Les acteurs européens de la coopération indirecte ont à ce niveau un rôle majeur à jouer.

- Nous nous engageons à développer ces alliances en vue de promouvoir des alternatives à la crise systémique dans toutes ses dimensions. Cela implique notamment de promouvoir le travail décent, la souveraineté alimentaire, la refondation de l’architecture financière internationale, l’annulation de la dette des pays du tiers-monde, le respect du droit international, l’égalité entre les femmes et les hommes, la diminution des émissions de gaz à effet de serre et la gestion durable et démocratique des ressources naturelles.

Nous nous engageons à organiser des actions coordonnées de sensibilisation et de plaidoyer, au Nord comme au Sud, en vue de traduire ce nouveau paradigme du développement en décisions politiques concrètes.



Arnaud ZACHARIE
Secrétaire Général
Centre National de Coopération au Développement (CNCD-11.11.11)

Quai du Commerce 9
1000 Bruxelles
Tél : +32 2 250 12 41
Fax : +32 2 250 12 63
E-mail: arnaud.zacharie@cncd.be
Site Web: www.cncd.be | www.agenda-solidaire.be
11.11.11: Un combat de pleins droits!